Oblivion

J’irai au bout

De la rue

De ta vue

De moi-même

Des aveux freinés

À la frontière de mes lèvres

Endormies

Endolories

Effrayées

De dire l’inavouable,

L’inexcusable,

L’émouvant,

Le beau

Comme si les mots

Ne suffisaient pas

À décrire

Les choses,

Les sentiments,

Les moments,

Le silence,

Comme si ce tango

De Piazzolla,

Oblivion,

Archets glissant sur les cordes d’un violoncelle

Et des altos, des violons,

Cet oubli-néant musical,

Révélait

Ma mélancolie constante.

 

© Texte, Denis Morin, 2019

Les histoires…

Les histoires de succès

Et d’échec

Se croisent

Sur les grands boulevards,

Dans les regards hagards

 

Les histoires d’amour

Pour toujours

S’écoutent à la radio

Et en fichiers MP3

Retour en mode pause

Tôt ou tard

 

Les histoires absurdes

Se content sur scène

Est-il obscène

De s’évader par le rire

Quand tout fout le camp

Quand mon voisin se meurt

 

Les histoires à venir

Dorment dans mes cahiers

À la claire fontaine…

Bleu, rouge, noir

Je donnerais ma vie…

Ah ! Devenir

Prévert, Hugo, Flaubert !

 

© Texte, Denis Morin, 2019

Le chien et mes regrets

Lierre

Ma théière refroidie

Plutôt son contenu

A ruisselé

Abreuvant ainsi

Le lierre

Hier,

Devrais-je écrire

Hier encore

Elles n’étaient que des pousses

Rentrées

À temps

Juste avant

L’hiver

Elles ont pris racine

Se sont déployées

Couvrant une colonne de plâtre

Et le dossier d’un fauteuil

Où vont dormir

Le chien et mes regrets.

 

© Photo, texte, Denis Morin, 2019

 

 

La dive bouteille

La dive bouteille

Bois de teck

Acheté

Ensemble procuré

Fruit d’une carte de fidélité

La vigne s’y accroche

Moi, je décroche

La dive bouteille t’a tué

À la longue

La vigne finit immanquablement

Par gagner

Voici les araignées rouges se baladant

Sur les fibres fissurées

À 18 h, je sortirai le rosé

En souvenir de ta couperose.

 

© Photo, texte, Denis Morin, 2019

Avec ou sans

Avec ou sans

Amertume

Avec ou sans

Nostalgie

Avec ou sans

Ta présence

Avec ou sans

Ton absence

Avec ou sans

Ton errance

Avec ou sans

Nos jours qui défilent

Avec ou sans

Le goût de te revoir

Avec ou sans

La joie de te ravoir

Avec ou sans

Ta voix

Avec ou sans

Le souvenir

Avec ou sans

Poésie

Avec ou sans

Joie

Avec ou sans

Ténèbres

Avec ou sans

Lumières

Pour me rendre

Chez toi.

 

© Texte, Denis Morin, 2019

 

Les chrysanthèmes

Faut-il un requiem

Pour dire je t’aime ?

Pierre tombale

Cymbale

Du vide

Pourrit le corps

Près de l’urne

Le rayon prend la poussière

Sont de mise

Les chrysanthèmes

Me salue(nt)

Ton esprit

Par des bruits,

Des objets cachés

Est-ce déplacé

De parler

Des morts chéris

Comme on vante

Le mérite des vivants ?

En rêve

Tu me visites

J’apprécie

Ce temps surnaturel

Où s’abattent

Les frontières

N’existent que nos essences premières.

 

© Texte, Denis Morin, 2019

Bossa spleen

Duras aimait déambuler

Sur les plages de Normandie

Moi, je le ferai en écoutant

Moustaki ou Nougaro

Par un jour de bossa spleen

Comment tant d’autres

 

Félix aimait marcher

Sa terre, fragment d’île

Seul, le nez contre le vent

Avant de s’en retourner

Écrire

 

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Je termine mon poétique télégramme

Ce soir, j’écouterai Pierre Lapointe

En buvant ma pinte.

 

© Texte, Denis Morin, 2019

Tes pas

Tes pas sur la neige

étrange manège

drôle de sortilège

pourrais-tu revenir ?

 

C’est un blues qui n’en finit pas

et j’étais si bien dans tes bras

 

Tes pas sur la grève

tous ces oiseaux qui crèvent

d’un manque de rêves

on ne peut les voir revenir

 

C’est un blues qui n’en finit pas

et j’étais si bien dans tes bras

 

Tes pas dans la forêt

je te suis à la trace

ton regard vert fougère

me hante, m’exaspère

 

C’est un blues qui n’en finit pas

et j’étais si bien dans tes bras (bis)

 

© Texte : Denis Morin, 2013