Mercredi dernier, j’animais le Café littéraire, un atelier de poésie dans le Vieux-Saint-Eustache, quand une participante d’un grand sac rouge cerise cette peinture. Je lui demande le pourquoi. Elle me répond par un « C’est un cadeau pour consoler les fantômes dans ton roman. »
Oui, il est vrai que dans ce roman, une dame du lac apparaît à certains moments et que des personnages périront par les eaux tumultueuses. J’éprouve de la tendresse pour les âmes errantes, à la fois anges gardiens et entités prisonnières de notre monde que l’on tarde à quitter définitivement.
Mais je trouve tout de même ce table apaisant comme il m’arrive parfois de causer en apparence seul dans ma maison à mes proches disparus. En guise de réponse, une forme se profile ou bien des cognements sur un meuble se font entendre.
Une lectrice de ma région m’a confié que mes romans Rose Meredith et Et cétéra l’ont aidée à vivre sereinement le deuil de son époux.
Une amie comédienne m’avais déjà mis sur la piste d’une reproduction de la toile choisie pour la couverture de Rose Meredith. En ajoutant cette nouvelle peinture »fantomatique », mon minuscule scriptorium tourne en galerie où les images et les mots font bon ménage pour ma plus grande joie.
Avouons-le, outre la partie créative, l’écriture est le reflet de nos expériences humaines partagées. On se fait du bien à soi, tout comme aux autres.
Quand Duras chez @AdretWebArt se présente pour sa box Femmes dans l’Art en poésie, en photo, en audio, en immersive 3D et en doc numériques sur clé ou via code QR.
Nous sommes une équipe dans ce projet et nous unissons les mots, les voix, les lieux. À notre façon, nous jouons avec le concept de la carte postale qui devient pour ainsi dire multiforme tout en lui ajoutant la dimension biographique.
Dans mon grand sac en bandoulière, j’apporte souvent avec moi un livre pour une future recension, un cahier pour des écrits divers, des stylos, etc.
Hier soir, j’y ai rangé un cahier à couverture tachetée. Que du noir et du blanc. Mes couleurs préférées, outre le bleu et le vert. Dans le bus direction Montréal, je me suis mis à relire mes notes de janvier dernier, puis mes personnages m’ont repris par la main. J’ai griffonné quelques répliques et développé une description.
À la maison, je peine à me concentrer. Il y a des courriels à répondre, du ménage à faire, la lessive, tant de choses pour me délier de ma pièce d’écriture. J’y arrive, si j’écoute du piano, ça m’apaise, ou bien si j’écris dans un lieu public. Je me crée une bulle et je déconne/je décolle grave.
Par le passé, j’ai déjà écrit presque trois recueils de poésie ainsi. Des nouvelles ont été retravaillées entre ma banlieue, presque la campagne, et le centre-ville bruyant de Montréal. Dans le métro, des flashes poétiques m’assaillent, je dois tout noter. Cet après-midi, je causais avec une collègue et j’ai commis un lapsus en nommant quelqu’un. Elle m’a répondu qu’il y avait là un nom de personnage.
Donc, si la tendance se maintient et les matinées suivantes, je serai en mesure de poursuivre le fil de ce nouveau polar où j’invite des personnages présentés dans mon polar L’ours et la ruche.
En outre, j’ai l’intention d’écrire une suite à mon roman Et cétéra.
La genèse de ce roman fut un rêve étrange dans lequel une écrivaine québécoise ouvrait un courrier en provenance de France pour y lire sur un papier au couleur et au parfum de lavande : « Je vous aimerai toujours. » Au réveil, j’ai noté l’idée sur papier.
Ensuite, je lui ai associé un notaire de mari, ennuyant comme la pluie, aux racines polonaises. Les prémices m’intriguaient. Un très bref canevas fut établi par la recherche de prénoms et de noms de famille. Le puzzle prenait forme.
En quelques jours, je me suis retrouvé avec des personnages du Québec, de France, de Pologne et d’Écosse. Cela m’a permis de me promener aussi dans le temps entre la Deuxième Guerre mondiale et 2021.
Contrairement à bien des artistes paralysés par le confinement, mon esprit était libre de créer à sa guise. Dans ce roman épistolaire écrit au printemps 2020, j’ai pu traiter aussi des dons musicaux et visuels qui se transmettent d’une génération à une autre. La génétique, c’est bien plus qu’une histoire de couleur de cheveux ou d’iris, il me semble. Nous sommes le fruit des générations précédentes et nous réinterprétons le monde dans notre siècle comme l’ont fait nos devanciers en leur temps.
Toute cette histoire s’est développée en écoutant la musique de Jean-Michel Blais, pianiste et compositeur de trames sonores pour le cinéaste Xavier Dolan. Si vous aimez la musique ou si vous souhaitez redécouvrir le roman épistolaire, un genre littéraire relégué aux oubliettes, je vous invite à lire Et cétéra qui reçoit jusqu’à présent des avis très favorables.
Extrait :
Elle prend la tête de Julien et l’appuie contre son ventre d’épouse et de mère. Elle lui murmure…
— L’amour, ça ne meurt jamais. C’est un bulbe qui tombe en dormance, mais qui se réveille et livre une fleur, grâce à un peu de chaleur.
Julien reprend son souffle à ce moment précis, embrasse la photo, pose le cadre sur son bureau avant de chuchoter sa gratitude.
— Merci d’être la femme de ma vie. Je ne te mérite pas.