Et si le verbe, je veux dire par cela l’expression artistique, est le supplément d’âme qui distingue l’Homme des autres espèces animales. Pourtant, cela ne signifie que l’on puisse asservir et détruire allégrement la nature comme nous l’avons fait depuis la révolution industrielle.
Et si le verbe était ce qui nous permettait de mieux faire ressentir l’expérience humaine à nos concitoyens, en toute solidarité, dans le sens le plus noble du terme, sans nécessité de passer par les jeux de la séduction, la cupidité maladive et la soif de domination.
Et si le verbe s’avère la meilleure façon de rejoindre l’autre, de l’émouvoir, de lui donner des ailes, tout en s’ancrant, racines plongées dans le terreau fertile de nos ancêtres.
Offert sous une présentation soignée et attrayante aux Éditions Le Baladin, le conte La petite goutte d’eau de l’écrivain Denis Morin s’adresse à tout enfant qui sommeille en chacun, chacune de nous, ainsi qu’à l’âme sage et innocente des plus jeunes.
Dans un langage riche, fluide et un style impeccable, l’auteur nous fait entrer dans un univers à la fois simple et enchanteur, en plein accord avec l’ordre du monde. Il y a dans ce très joli conte quelque chose d’apaisant, de rassurant, à propos de cette fabuleuse aventure de la vie et qui lui donne sens. Un peu à la manière du Petit prince de Saint-Exupéry, la petite goutte d’eau explore, voyage dans cet univers, fait des rencontres, expérimente, apprend…
Cycle de l’eau, cycle de vie… et la boucle se boucle. Moment de lecture douce et bienfaisante.
Je viens de discuter avec Diane Boudreau, peintre et poète, sur le pourquoi de l’écriture et le lectorat. Nous nous disions que nous écrivons pour laisser une trace de soi, d’une expérience humaine. Par l’intermédiaire du livre-objet, c’est le partage qui se vit de soi vers l’autre.
À la blague, je dis souvent que l’écrivain conçoit un trousseau pour sa succession en termes de textes, pas juste de droits à percevoir.
Sans aucun doute, la joie de s’exprimer s’ajoute à celle de créer. L’écrivain endosse l’habit de l’artisan semeur de mots. Dans ce monde où tout va si vite, il est bon de savoir se poser de temps à autre sur un pourtour d’horizon pour savoir savourer les heures et tenter d’apprécier le présent si (im)parfait soit-il.
Et puis, tout s’entremêle, son vécu personnel, des personnages inventés plus ou moins loin de soi, des impressions, des ressentis, des fulgurances créatrices. Dans le chaudron de l’imaginaire, on touille à gauche et à droite. Le résultat donne un tout sucré, salé, acidulé, doux-amer, selon les ingrédients mis et les émotions versées.
Somme toute, chaque texte est une aventure et une traversée, peu importe sa longueur et sa teneur. La littérature s’avère plus qu’une histoire de genres prédéfinis : conte, poésie, théâtre, nouvelle, roman, essai, biographie.